Genève internationale
C’est dans les transports publics qu’on se rend compte à quel point Genève attire les étrangers.
Dimanche dernier, je me rendais en bus à Vésenaz. Au départ à Rive, un jeune couple vient s’asseoir près de moi, la femme à ma gauche et l’homme en face de moi. Je leur propose de changer de place pour qu’ils puissent s’installer côte à côte. Ils refusent et, sans se parler, ils se mettent tous deux à lire.
Excusez-moi ! Il manquait la première ligne de mon texte et la voilà !
près de moi, la femme à ma gauche et l’homme en face de moi. Je leur propose de changer de place pour qu’ils puissent s’installer côte à côte. Ils refusent et, sans se parler, ils se mettent tous deux à lire.
Ni l’un ni l’autre ne regardent les lieux que nous traversons, pourtant superbes. Le ciel est magnifiquement bleu, le lac a attiré de nombreux navigateurs et les voiles blanches flottent de-ci de- là. Les plages sont presque aussi animées qu’en plein été. C’est vraiment une journée de rêve.
Comme j’aime deviner les goûts littéraires des gens, je guigne du côté de ma voisine et je réussis à découvrir qu’il s’agit d’un roman anglais, Pride and Prejudice de Jane Austen. Elle en est déjà à la moitié.
En face, l’homme, lui, entame son livre par les premières pages. Je peux voir le titre de l’ouvrage, assez épais. Mais les mots me sont totalement étrangers. Je ne parviens pas à deviner le langage, pourtant en caractères latins. Il est tellement absorbé par sa lecture que je n’ose pas lui demander de quoi il s’agit et je quitte le bus à Vésenaz, un peu frustrée.
En même temps que moi, une femme sort du bus. Elle se dirige dans la même direction, un téléphone à la main où elle s’exprime dans une langue qui m’est inconnue. Sa longue robe aux couleurs vives cache à peine sa corpulence. Là encore je n’ose pas l’aborder, car elle n’arrête pas de parler.
Europe
Ce n’est qu’arrivée près de la fontaine du chemin de Mancy, quand elle se rafraîchit la main, qui ne tient pas son fichu téléphone, que j’ose m’approcher. Je lui demande quelle langue elle parlait. Le roumain, me répond-elle, avec un accent, mais dans un excellent français. Elle semble désireuse d’entamer la conversation. Elle vient de Moldavie, voisine de la Roumanie et de l’Ukraine, m’explique-t-elle. Et nous nous désolons ensemble de la triste situation en Ukraine . Mais nos chemins se séparent et je ne saurai rien des raisons qui l’ont poussée à se trouver à Genève.
Plus tard, je rentre en ville par la même ligne de bus. De nouveau, je me trouve face à des personnes conversant dans une langue qui, elle, ne me parle pas. Deux hommes, l’un un peu grassouillet, très chaleureux envers son ami plus placide, semblent plaisanter. Lorsque je m’apprête à quitter le bus, je ne peux retenir ma curiosité et je leur pose la question habituelle. Quelle langue ? Celle du Kosovo ! Décidément, nous sommes en Europe.
Le lendemain, rendez-vous chez le physiothérapeute, qui, comme beaucoup de ceux qui travaillent dans les soins à la personne, est Français. Mais, pour renforcer mes constatations, il me raconte qu’il a une grand-mère arménienne.
Statistiques
Ces rencontres avec des étrangers m’ont incitée à fouiller dans les statistiques du canton de Genève. J’y ai appris qu’en 2024 il y avait plus d’étrangers (220.024) que de Genevois (203.119) et que Genève est le canton à la plus forte population étrangère : 41,5%.
Les Français sont les plus nombreux (39.075), suivis par les Portugais (30.689), les Espagnols (16.680), le Kosovo (7.631), le Brésil (5.496), les Etats-Unis (3.917) et sans doute l’un des plus petits contingents, le Liechtenstein (25).
Cependant, une question me tracasse : 33% sont totalement Suisses, 30% sont binationaux Suisses+étrangers et 37% totalement étrangers. Comment compte-t-on les habitants qui, comme moi, ont deux nationalités étrangères (néerlandaise et française) ?